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Le 2 septembre dernier, l’amphithéâtre de l’Université Haute-Alsace (UHA) a accueilli la troisième réunion de pré-vendanges organisée par l’Union des Œnologues d’Alsace. Cet événement, devenu un rendez-vous incontournable pour les professionnels du secteur viticole, a attiré près d’une cinquantaine de participants, marquant une nouvelle étape dans la préparation de la saison des vendanges.

Sous la houlette de Alain Schmitt, président de l’Union des Œnologues d’Alsace, et de son équipe, cette rencontre a eu lieu dans une atmosphère à la fois conviviale et studieuse, axée sur la collaboration et le partage d’expertise. En ouverture de la réunion, Alain Schmitt a exprimé sa gratitude envers tous les participants et partenaires. Il a également souligné le succès du Congrès national des œnologues de France, récemment organisé en Alsace, qui a rassemblé près de 200 professionnels. Cet événement a non seulement renforcé l’image de la région, mais a aussi mis en lumière les compétences du secteur viticole alsacien, grâce à une organisation minutieuse et à l’implication des membres de l’Union.

La réunion de pré-vendanges a duré environ deux heures et a été rythmée par plusieurs interventions d’experts, abordant divers aspects de l’année viticole et des innovations en cours.

Bilan de l’année viticole 2024, entre défis climatiques et perspectives

Frédéric Schwaerzler, conseiller viticole à la Chambre d’agriculture d’Alsace, a ouvert le bal avec un bilan détaillé de l’année viticole 2024. Cette saison a été marquée par des conditions climatiques exceptionnelles, notamment une pluviométrie abondante depuis l’automne 2023. Les sols détrempés ont compliqué les travaux viticoles, provoquant un débourrement précoce au printemps et un retard dans les opérations essentielles. Les pluies persistantes de mai à juillet ont exacerbé la pression du mildiou et ont nécessité une intensification des traitements phytosanitaires.

Le phénomène de floraison simultanée de cépages habituellement décalés dans leur cycle, comme le Riesling et le Gewurztraminer, a également été noté, ce qui pourrait influencer les caractéristiques du millésime. Les orages localisésd’août ont accentué les difficultés liées à l’humidité, bien que l’absence de stress hydrique ait constitué une note positive.

Malgré ces défis, certaines zones, notamment autour de Colmar et sur les sols granitiques des grands crus, montrent un potentiel qualitatif prometteur. Toutefois, Frédéric Schwaerzler met en garde contre les risques d’une surcharge en potassium, qui pourrait altérer l’équilibre acide des vins et provoquer des précipitations tartriques.

L’année a également été marquée par l’apparition de nouvelles menaces, comme les attaques de guêpes et d’abeilles, ainsi que des problèmes liés à la présence accrue de pince-oreilles et de vers de la grappe, qui pourraient affecter les récoltes futures.

Les maladies du bois, une problématique persistante

Christophe Bertsch, professeur à l’UHA et expert en phytopathologie, a ensuite abordé les maladies du bois des vignes, un défi majeur pour les viticulteurs à l’échelle mondiale. Bien que ces maladies, regroupées sous le terme d’Esca, soient connues depuis plus d’un siècle, leur origine et leur traitement restent en grande partie mystérieux. Les symptômes visibles incluent des nécroses et des halos caractéristiques, mais les causes exactes de ces maladies demeurent obscures.

Christophe Bertsch a évoqué diverses méthodes traditionnelles de lutte, comme le curetage, ainsi que des pratiques de taille pour préserver le flux de sève. Cependant, malgré ces efforts, la lutte contre les maladies du bois reste complexe. Les recherches continuent sur les champignons pathogènes comme Fomitiporia mediterranea et les interactions entre champignons, virus et bactéries.

Des avancées récentes, telles que la découverte de la “poudre noire” et des travaux sur le stress hydrique, offrent de nouvelles pistes de recherche et d’espoir pour mieux gérer ces maladies.

Contrôle de maturité 2024, état des lieux

Arthur Froehly, responsable technique au Conseil interprofessionnel des Vins d’Alsace (CIVA), a présenté les résultats des contrôles de maturité pour le millésime 2024. Les premiers prélèvements réalisés fin août montrent une accélérationde la maturation des cépages précoces, comme le Pinot Blanc et le Gewurztraminer. En revanche, les cépages tardifs, tels que le Riesling et le Sylvaner, affichent une maturité plus faible. L’acidité élevée de cette année est considérée comme un atout pour l’équilibre des vins, bien que des ajustements soient nécessaires en fonction des conditions météorologiques.

Les VIFA, une autre réponse aux changements climatiques

Enfin, Arthur Froehly a présenté les cépages VIFA (Variétés d’Intérêt à Fin d’Adaptation), introduits pour leur résistance aux changements climatiques et leur capacité à réduire l’utilisation de traitements phytosanitaires. Parmi les cépages sélectionnés figurent le Chenin, le Vermentino, la Syrah, et le Nebbiolo. Ces cépages offrent de nouvelles perspectives pour les vignerons, tandis que les cépages résistants, tels que le Coliris et le Voltis, apportent des solutions intéressantes face aux maladies comme le mildiou.

La vinification et les défis du millésime

Éric Meistermann, directeur du Pôle Alsace de l’Institut français de la vigne et du vin (IFV), a discuté des défis de cette récolte, marquée par des conditions climatiques difficiles et des attaques de mildiou. Il a noté une hétérogénéité marquée dans la récolte, avec des baies touchées par le mildiou et l’oïdium, qui modifient la composition du raisin et peuvent influencer le goût des vins, notamment en termes de couleur et de structure pour les rouges. Il a souligné la nécessité d’une attention particulière lors du débourbage pour éviter les goûts indésirables et a abordé la question des résidus de produits phytosanitaires, comme le soufre et le cuivre, qui peuvent affecter le processus de fermentation et la qualité des vins.

Le Vinopôle Alsace

Christophe Bertsch a présenté le Vinopôle Alsace, un projet ambitieux visant à promouvoir l’innovation viticole dans la région. Un projet qui est mené en parallèle de la création d’une nouvelle Maison des Vins et d’une Cité des Vins. Le Vinopôle se concentre sur des domaines clés comme la gestion des itinéraires techniques, la création variétale, et la durabilité du secteur. Des initiatives comme le consortium contre les dépérissements du vignoble et des projets de formation sont en cours. Le Vinopôle bénéficie du soutien de nombreux partenaires et de la ville de Colmar.

Les variétés résistantes

Jérôme Keller, conseil en viticulture et œnologie, a présenté des variétés résistantes innovantes, qui combinent résistance aux maladies avec qualité gustative. Les échantillons provenant de Foncalieux et de VCR montrent un progrès par rapport aux anciens hybrides, avec des cépages comme l’Artaban et le Vidoc. Ces nouvelles variétés représentent une avancée significative dans la viticulture, offrant des perspectives prometteuses pour l’avenir.

Bilan du Congrès de l’Union des Œnologues d’Alsace

Le congrès de l’UOEF a marqué un retour en Alsace après plusieurs années, avec une organisation saluée pour sa qualité et son contenu. Jérôme Sciacchitano a souligné l’importance des masterclasses et l’inclusion des jeunes œnologues. L’événement a mis en avant la forte adhésion au syndicat et a annoncé que le congrès de l’année prochaine se tiendra au Puy-du-Fou. Un événement inédit à la fin de l’année, mettant en avant les partenaires principaux de l’Union, tels que l’IOC, Sofralab, la Société Diam, et CDM Alimpex. Ce sera l’occasion de présenter leurs savoir-faire et leurs innovations en matière de recherche et développement, avec une demi-journée technique prévue pour partager ces connaissances avec les membres.

La soirée s’est terminée par un apéritif convivial offert par Sofralab, permettant aux participants de se détendre et de discuter informellement des sujets abordés, tout en découvrant les nouvelles variétés résistantes.