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Ce matin, dans le paisible village de Dorlisheim, le Syndicat des Vignerons Indépendants d’Alsace (Synvira) a organisé une conférence de presse pour faire le point sur l’état des vendanges, l’économie viticole et les défis actuelsdu vignoble alsacien. Accueillie au Domaine Backert par le président du Synvira, Francis Backert, accompagné de Clémence Wagner, responsable communication, et d’Alain Renou, directeur du Synvira, cette rencontre a permis de dresser un bilan complet de l’année viticole 2024.

Bilan de l’année 2024, entre défis météorologiques et espoirs pour l’avenir
L’année 2024 a été marquée par des défis sans précédent pour les viticulteurs alsaciens, principalement liés aux conditions climatiques difficiles. Le printemps a été dominé par des pluies intenses et régulières, perturbant les premières phases de croissance des vignes. Puis, un été capricieux, avec des périodes de chaleur suivies de pluies soudaines, a continué de compliquer les choses pour les vignerons.
« Nous avons vécu l’un des mois de vendanges les plus pluvieux des vingt dernières années », a confié Francis Backert, résumant le sentiment général des producteurs alsaciens. Les parcelles de Pinot Gris et d’Auxerrois ont particulièrement souffert, avec des rendements parfois proches du néant dans certaines régions. Malgré tout, les viticulteurs ont fait preuve de résilience, s’adaptant à ces conditions extrêmes et se concentrant sur la production de vins de qualité.

Récoltes inégales et hétérogènes
Les disparités géographiques ont été un élément marquant de cette année viticole. À quelques kilomètres de distance, les résultats pouvaient varier considérablement. Certaines parcelles ont produit des volumes satisfaisants, tandis que d’autres ont été largement impactées par la météo, produisant peu ou pas de raisins. Cette hétérogénéité rend difficile l’établissement de prévisions précises pour la production alsacienne de 2024, qui pourrait ne pas atteindre les 900 000 hectolitres initialement prévus.
Malgré ces difficultés, les vignerons se réjouissent de la qualité des raisins récoltés. « Les vins de 2024, bien que réduits en volume, semblent répondre aux attentes des consommateurs en quête de fraîcheur et de modération dans les degrés d’alcool », souligne Francis Backert. Les vins devraient titrer autour de 12 degrés d’alcool, un niveau bien en deçà des millésimes précédents, plus solaires, ce qui correspond à une demande croissante pour des vins moins puissants et plus accessibles.

Un Gewurztraminer en pleine forme malgré une demande fluctuante
Le Gewurztraminer, cépage emblématique d’Alsace, a réussi à tirer son épingle du jeu en 2024 avec des rendements plutôt satisfaisants, voire généreux, dans certaines zones. Toutefois, la demande pour ce cépage sur les marchés internationaux, notamment en Allemagne, a nettement diminué. Cette baisse ne reflète pas une diminution de la qualitédes vins, mais plutôt un contexte économique global défavorable. En revanche, sur le marché français, le Gewurztraminer continue de séduire les amateurs, notamment lors des ventes en cave et des salons.

La jeune génération, porteuse d’innovation et d’espoir
Face aux défis, une nouvelle génération de vignerons alsaciens est en train de prendre la relève avec une approche innovante et ambitieuse. « Un vigneron sur quatre en Alsace possède aujourd’hui un diplôme de niveau Bac+5 », a noté Clémence Wagner, illustrant l’évolution des compétences dans le métier. Ces jeunes vignerons misent sur la qualitéet l’authenticité pour répondre aux attentes d’un marché en pleine mutation.
Les salons professionnels à Paris et à l’étranger, ainsi que des collaborations avec d’autres régions viticoles comme la Champagne, font partie des initiatives permettant de renforcer la présence des vins d’Alsace à l’international. De plus, ces jeunes vignerons sont conscients des nouvelles attentes des consommateurs, notamment en matière de vins biologiques, biodynamiques et nature.

L’adaptation aux nouvelles tendances de consommation
Les modes de consommation évoluent, et les viticulteurs alsaciens doivent s’adapter. En France, les consommateurs sont de plus en plus enclins à dépenser entre 11 et 20 euros pour une bouteille de vin, contre des prix plus bas observés il y a une décennie. Cette montée en gamme reflète un changement d’attitude en faveur des produits artisanaux et respectueux des terroirs. Les vins d’Alsace, avec leur diversité et leur qualité, se positionnent bien pour répondre à cette nouvelle demande.

Un secteur en pleine mutation
Depuis une dizaine d’années, les tendances viticoles ont évolué, et l’Alsace s’est imposée comme une région pionnièredans des segments tels que les vins oranges, biologiques, biodynamiques et nature. Bien que ces marchés restent de niche, ils représentent une opportunité pour les producteurs alsaciens de diversifier leur offre et d’attirer une nouvelle clientèle.
L’accent mis sur les vins de terroir est également un enjeu crucial pour la région. Les vignerons alsaciens, soutenus par l’Organisme de Défense et de Gestion (ODG), œuvrent à une meilleure valorisation des terroirs. « Nous devons continuer à revendiquer l’importance du terroir dans la production viticole, tout en innovant », explique Francis Backert.

Le Pinot Noir, un cépage en pleine renaissance
Longtemps relégué au second plan, le Pinot Noir connaît un véritable renouveau en Alsace. Alors que la région est principalement connue pour ses vins blancs, notamment le Riesling, le Pinot Noir, autrefois célébré pour ses vins rouges, fait un retour remarqué.
Toutefois, le prix de certains Pinot Noirs, vendus à plus de 20 euros, reste un frein pour certains consommateurs locaux. Cependant, pour les amateurs éclairés, la qualité de ces vins justifie largement leur coût.

Hiérarchisation des vins, un enjeu stratégique pour l’Alsace
L’un des défis majeurs pour l’Alsace est la structuration de son offre viticole. Bien que la région dispose de Grands Crus reconnus, il manque une hiérarchie intermédiaire entre les vins d’entrée de gamme et les Grands Crus. La création de nouvelles catégories, comme les « crus » intermédiaires, pourrait permettre de valoriser les vins de qualité supérieure, tout en restant accessibles à une clientèle plus large.
Le débat autour de la création d’une appellation « Premier Cru » en Alsace est également d’actualité, bien qu’il rencontre une certaine résistance, notamment en raison de la concurrence avec d’autres régions, comme la Bourgogne. Cependant, une meilleure classification des terroirs locaux progresse, soutenue par la mise en place d’une carte détaillée des lieux-dits sur le site des vignerons alsaciens.

La distribution, un défi crucial pour les vignerons indépendants
La question de la distribution des vins d’Alsace, en particulier dans la grande distribution, reste un enjeu de taille pour les petits producteurs. « Il est difficile de rivaliser avec les grandes exploitations qui produisent en masse », souligne Francis Backert. Toutefois, la grande distribution reste un canal de vente incontournable, même si les vignerons alsaciens préfèrent souvent se concentrer sur des circuits plus spécialisés, comme les ventes en direct ou les salons.
Les ventes directes ont d’ailleurs connu une forte progression ces dernières années, avec une augmentation de plus de 20 % de la fréquentation des salons viticoles en 2023. Ce mode de distribution permet aux producteurs de créer un lien direct avec leurs clients et de leur offrir une expérience plus personnalisée.

L’exportation, une opportunité encore sous-exploitée
Si l’exportation représente un axe de développement stratégique pour les vignerons alsaciens, elle reste un défi majeur. Bien que 64 % des vignerons indépendants travaillent à l’export, la majorité se concentre sur les marchés nationaux. Les marchés internationaux, quant à eux, sont perçus comme inaccessibles pour les petits producteurs en raison des coûts logistiques et des contraintes administratives.
Cependant, des événements comme Wine Paris ou ProWein à Düsseldorf offrent des plateformes idéales pour augmenter la visibilité des vins alsaciens à l’international. Les producteurs doivent continuer à s’y investir, même à petite échelle, pour mieux se positionner face à la concurrence internationale.

L’œnotourisme, un levier majeur pour l’Alsace
L’Alsace reste une destination incontournable pour les amateurs de vin. La Route des Vins d’Alsace, véritable monument vivant de la région, est l’une des principales attractions touristiques. Selon les chiffres, 70 % des touristes viennent en Alsace pour découvrir cette route légendaire, qui traverse des paysages viticoles exceptionnels.
Pour les vignerons, l’enjeu est de continuer à valoriser cette richesse tout en adaptant leurs pratiques aux défis environnementaux. « L’Alsace, c’est aussi du vignoble », rappelle Alain Renou, soulignant l’importance de la promotion des produits locaux et de la viticulture dans l’économie régionale.

L’Alsace accueillera les Rencontres Nationales des Vignerons Indépendants en 2025
Une nouvelle majeure se prépare pour le monde viticole alsacien. En avril 2025, l’Alsace accueillera les Rencontres Nationales des Vignerons Indépendants, un événement de grande envergure qui réunira des professionnels de toute la France. Prévu pour les 1er et 2 avril, cet événement aura pour thème principal l’œnotourisme, un sujet au cœur des préoccupations locales.
Clémence Wagner, explique « Nous aurons deux journées de conférences, de débats et de visites à travers la région pour promouvoir les terroirs et le savoir-faire alsacien. Nous attendons entre 300 et 350 participants venant des quatre coins du pays ». Un programme riche en rencontres, où l’union des vignerons sera mise en avant. L’Alsace se positionne ainsi comme un acteur majeur dans la promotion de l’œnotourisme, une pratique qui attire chaque année de nombreux visiteurs.

« Parlons Cru », un événement phare pour les jeunes vignerons
Avant cela, un autre rendez-vous attend les amateurs de vin : l’événement « Parlons Cru », qui aura lieu le 21 octobre. Organisé par les jeunes vignerons indépendants, cet événement mettra en avant les vins de lieux et les Grands Crus d’Alsace. Les participants pourront découvrir la richesse des terroirs à travers des dégustations et des échanges avec les producteurs.
Cet événement se déroulera en deux temps : une masterclass réservée aux professionnels à 17h, puis un afterwork convivial à 19h, ouvert au public. Ce dernier permettra aux visiteurs de découvrir les spécificités des vins de lieux et de Grands Crus dans une ambiance décontractée, accompagnée d’un cocktail dinatoire.
Pour vous inscrire à cet événement exceptionnel, vous pouvez encore le faire ICI.