Avant de nous plonger pleinement dans cette délicieuse soirée, il convient de souligner que les accords mets-vins ont été soigneusement pensés, avec deux vins proposés pour chaque plat. Cette approche permettait de répondre au mieux aux attentes et aux préférences de chaque palais, assurant ainsi une satisfaction pour tous les convives.
Maintenant, venons-en aux accords culinaires qui ne manqueront pas de mettre l’eau à la bouche :
La Confrérie Saint-Etienne organise des ateliers de découverte ouverts au public, proposant deux formules distinctes. Tout d’abord, les ateliers de dégustation « simple » abordent divers thèmes, tandis que les ateliers « chefs » offrent une expérience de dégustation de vins en accord avec des plats, qu’il s’agisse de mets salés, sucrés, de restaurants, de chocolatiers, et bien d’autres.
Le 13 avril dernier, la Confrérie Saint-Etienne a inauguré sa première session « chef » de l’année sur le thème captivant « Promenade dans les Jardins de Kyoto », animée par la cheffe Yoko Tsuji. Cette séance était l’occasion de savourer des vins soigneusement sélectionnés en harmonie avec des plats qui évoquaient l’atmosphère et les saveurs du Japon.
Comme le veut la tradition dans ce sanctuaire des vins d’Alsace, la soirée a commencé par un accueil chaleureux avec un verre de Crémant. Pour cette occasion, c’est le Crémant Brut Prestige (2019) du Domaine de l’École à Rouffach qui a été choisi, élaboré à partir d’un assemblage équilibré de 50% de Pinot Blanc et 50% de Pinot Noir avec 36 mois de vieillissement sur lattes .
Son bouquet révélait des arômes délicats de fleurs blanches, accompagnés d’une subtile touche briochée. La bulle fine était à la fois légère et soyeuse, apportant une agréable sensation en bouche. On pouvait également distinguer de délicates notes citronnées et florales, ajoutant une touche de fraîcheur supplémentaire. Un très beau Crémant de gastronomie.
Le premier met dégusté était un délicieux chirashi sushi aux crevettes et pamplemousse, accompagné d’une sauce ponzu et de combava. Ce plat se compose d’un lit de riz vinaigré froid garni de crevettes et de segments de pamplemousse, le tout rehaussé d’une sauce soja vinaigrée et parfumée au combava, un agrume aux notes citronnées. Pour sublimer ce met raffiné, deux vins ont été proposés.
Sylvaner Vieilles Vignes 2019 de la Cave de Ribeauvillé. Ce vin se caractérise par un nez discret, tandis que sa bouche offre une belle fraîcheur, bien qu’elle puisse être légèrement asséchante, avec une remarquable longueur en fin de bouche.
Pinot Blanc Rosenbourg 2020 du Domaine André Blanck de Kientzheim. Ce vin se distingue par un nez expressif et une bouche à la fois généreuse et fruitée, avec une finale délicate aux légères notes amères.
Plat équilibré, avec une texture légèrement grasse grâce aux crevettes et une sauce qui apporte une touche de vivacité. Le pamplemousse apporte également une note acidulée qui donne du peps à l’ensemble du plat. Dans cet accord, le Pinot Blanc offre une dimension gustative équilibrée, mais sa présence peut être bousculée en fin de bouche par l’intensité du pamplemousse. D’autre part, le Sylvaner, avec sa fraîcheur et sa longueur en fin de bouche, prend d’avantage le dessus sur le plat. Son caractère plus prononcé et sa capacité à rafraîchir le palais offrent une transition agréable avant de passer à la prochaine bouchée.
Le met suivant était une salade de nouilles soba et tofu, accompagnée d’une vinaigrette au wasabi et au sésame. Ce plat mettait en valeur des nouilles de sarrasin, associées à une vinaigrette à base d’huile de sésame et de wasabi, agrémentées de tofu frit, de jeunes pousses et de fines lamelles de radis. Pour accompagner cette salade savoureuse et équilibrée, deux vins ont été sélectionnés.
Le premier choix était le Pinot Blanc Rosenbourg 2020 du Domaine André Blanck, déjà présenté précédemment.
Le deuxième était un Pinot Gris Brandhof 2018 de la Cave de Cleebourg. Ce vin présente un nez discret qui s’ouvre progressivement pour révéler des notes légèrement toastées et de fruits jaunes. En bouche, il se caractérise par une belle fraîcheur et une vivacité tranchante, avec des nuances de fruits confits.
Ce plat offre une combinaison équilibrée de saveurs et de textures. Les nouilles soba, légères, agrémentées de leur vinaigrette wasabi et sésame qui apporte une touche épicée et aromatique. Le tofu frit ajoute une texture croustillante et une note de douceur, tandis que les jeunes pousses et les lamelles de radis ajoutent de la fraîcheur et de la couleur.
Il est intéressant de constater que le choix entre le Pinot Blanc Rosenbourg et le Pinot Gris Brandhof a été assez clair. L’accord avec le Pinot Blanc s’est révélé tranchant, voire presque rebutant pour certains. L’intensité du vin a créé une confrontation avec les saveurs du plat. En revanche, l’accord avec le Pinot Gris a été tout à fait différent. Le vin a offert un accompagnement en douceur, permettant aux saveurs du plat de s’exprimer pleinement. Seul le wasabi, avec son piquant caractéristique, a pris le dessus, créant un bel équilibre entre les saveurs du plat et les caractéristiques du vin.
La dégustation continue avec une truite saumonée grillée à la sauce miso. Un plat qui mettait en valeur la saveur et la texture de la truite saumonée, avec sa chair délicate et rosée qui était grillée pour obtenir une légère caramélisation. La truite était accompagnée d’une sauce miso et d’asperges vertes, le tout parsemé de graines de sésames. Deux vins ont été proposés pour accompagner ce met.
Le premier choix était un Riesling Grand Cru Schlossberg 2018 du Domaine Kirrenbourg de Kientzheim. Ce vin se caractérise par un nez expressif dévoilant des arômes de citron et d’ananas. En bouche, il présente une texture souple, une belle droiture et une minéralité qui se prolonge jusqu’à une finale subtilement amère.
Le second vin proposé était un Sylvaner Grand Cru Zotzenberg 2019 du Domaine Alfred Wantz de Mittelbergheim. Ce vin se caractérise par une discrétion initiale au nez, mais qui se révèle progressivement à l’aération avec des notes végétales fraîches et une légère nuance beurrée. En bouche, il se révèle puissant et salin, offrant une belle longueur. Cependant, il est à noter qu’en fin de bouche l’amertume se fait plus prononcée, marquant légèrement le profil gustatif.
Le plat met en valeur les saveurs de la truite saumonée grillée et la sauce miso apporte une saveur umami profonde et salée qui se marie parfaitement avec le poisson. Il est intéressant de noter que le Riesling prend le dessus sur le plat, se distinguant même face à la sauce. Cet accord peut être considéré comme une confrontation, où le vin et le plat rivalisent en termes de saveurs et d’intensité. L’accord avec le Sylvaner est bien plus harmonieux, permettant au plat de s’exprimer pleinement. Contrairement à l’accord de confrontation avec le Riesling, l’accord avec le Sylvaner crée une harmonie entre le vin et le plat, où les saveurs se complètent et se mettent en valeur mutuellement.
L’atelier s’est clôturé avec un porc braisé japonais façon kakuni, un plat savoureux avec des notes sucrées et salées qui mettent en valeur une viande tendre et fondante. L’ensemble est accompagné de petits légumes mijotés ajoutant une touche de fraîcheur. Pour accompagner ce met deux vins sont proposés.
Le premier choix était un Pinot Noir « l’Impatient » 2018 de la Cave de Bestheim, qui se caractérise par un nez expressif avec des arômes de fruits rouges kirchés. En bouche, ce vin offre une belle franchise et des notes prononcées de petits fruits rouges. Cependant, il est à noter que la fin de bouche présente des amers légèrement trop prononcés et que le vin manque un peu de matière.
Le deuxième choix était un Pinot Gris Bollenberg 2015 du Domaine Camille Braun d’Orschwihr. Ce vin se distinguait par un nez expressif dévoilant des notes de surmaturités et de fruits jaunes. En bouche, il se révèle ample et soyeux avec une texture presque mielleuse. Il présente un bel équilibre et une très belle longueur en bouche.
Le porc braisé japonais façon kakuni est un plat complexe, avec un mélange de saveurs salées et sucrées, ainsi que des textures à la fois croquantes et fondantes. Dans de tels cas, il est souvent préférable de rechercher un vin qui apporte à la fois de la fraîcheur et de la complexité aromatique pour équilibrer et compléter ces différentes dimensions du plat. Malheureusement le Pinot Noir de Bestheim, bien que possédant des qualités intéressantes, n’était peut-être pas le meilleur choix pour accompagner ce plat. Par contre, le Pinot Gris avec sa matière plus riche et sa texture plus ample, apportait une complémentarité gustative au plat.
Les convives de la soirée étaient impatients de découvrir ce qui les attendait, mais leurs inquiétudes se sont rapidement dissipées. En effet, ces derniers temps, les visiteurs du château ont été comblés par la qualité des ateliers précédents, et cette soirée ne faisait pas exception. Le succès de l’événement était indéniable, avec une quarantaine de chanceux qui en ont profité pleinement. Estelle Geiller, Major 2023, a sélectionné les vins en suivant attentivement les instructions précises de la talentueuse cheffe Yoko Tsuji. La précision et les connaissances de chacune dans leur domaine respectif ont abouti à une parfaite harmonie entre les mets et les vins. Un grand bravo à toutes pour cette réussite !