La variété de vigne Riesling possède une résistance naturelle au virus du court-noué, encore inconnue il y a peu. C’est la conclusion d’une recherche débutée il y a plus de 10 ans par des chercheurs INRAE, publiée le 28 mai dans un article de la revue Communications Biology. Des travaux associant génétique et pathologie leur ont permis de découvrir un facteur génétique qui confère au Riesling une résistance naturelle, une première dans la lutte contre ce virus qui touche près de 70% des vignobles français. Cette découverte ouvre la voie à la première solution génétique efficace et respectueuse de l’environnement pour contrôler la maladie du court-noué de la vigne.
Le grapevine fanleaf virus (GFLV) est le principal virus responsable du court-noué. Les baisses de production resultant d’infections par cet agent pathogène, dépassent 70 % dans les cas les plus sévères et sont responsables, en France, de pertes économiques d’au moins 400 M€ par an1. Il est transmis aux racines de la plante par un minuscule ver présent dans le sol : le nématode Xiphinema index. N’épargnant aucun organe, le GFLV migre dans les parties aériennes de la vigne où il cause de multiples dommages, allant de symptômes atténués à une dégénérescence entrainant la mort, en passant par une diminution de la vigueur, de la fertilité et de la production. Des méthodes préventives permettent de réduire l’impact de la maladie, mais aucune méthode curative n’est disponible à ce jour.
Toutefois, des chercheurs INRAE tiennent une piste prometteuse, le fruit de travaux de recherche associant génétique et pathologie, initiés il y a 10 ans et visant à identifier des résistances naturelles : la variété Riesling présente une résistance au court-noué. Pour identifier une telle résistance, les scientifiques ont mis en place en serre un dispositif expérimental original reproduisant les conditions de la transmission naturelle du virus au vignoble. Des analyses approfondies révèlent que cette résistance naturelle est spécifiquement dirigée contre le GFLV et pas contre le nématode X. index. Elle est déterminée par un facteur génétique unique, baptisé rgflv1, et localisé sur le chromosome 1 du génome de la vigne. En plus de conférer une résistance au court-noué, rgflv1 pourrait être plus largement un facteur de résistance aux virus, qui serait probablement distinct de ceux déjà découverts chez d’autres espèces végétales.
Cette découverte ouvre la voie à une solution efficace et respectueuse de l’environnement pour contrôler la maladie du court-noué de la vigne : le développement de nouveaux porte-greffes2 résistants au GFLV. Ces porte-greffes pourront avoir un impact sur la longévité et la pérennité des vignobles non seulement en France, mais aussi dans le monde entier, en agissant comme un levier pour lutter contre les dépérissements de la vigne dus au court-noué. Plus largement, ce travail pourra servir de socle pour découvrir un nouveau type de facteurs de résistance conservé chez de nombreuses espèces cultivées. Au-delà de son intérêt pour contribuer à une solution aux problèmes agricoles liés aux viroses, cette étude constitue un tremplin pour accéder à de nouvelles informations fondamentales sur les interactions plantes-virus.
Le court noué : une véritable pandémie virale chez la vigne
Plusieurs voies sont explorées pour lutter contre le court-noué :
- l’utilisation de porte-greffes tolérants aux nématodes vecteurs du virus ;
- le biocontrôle grâce à la prémunition, une méthode consistant à « vacciner » des plants à l’aide de souches de virus hypo-agressifs, ou grâce à des plantes à effet nématicide permettant de réduire le potentiel infectieux du sol ;
- des approches biotechnologiques utilisant des plantes génétiquement modifiées exprimant différentes constructions gèniques.
Mais aucune de ces pistes n’a, à ce jour, permis de développer une solution concrète et applicable, étant soit à l’état expérimental, soit encore mal acceptées par la société.
Contacts scientifiques
- Didier Merdinoglu – didier.merdinoglu@inrae.fr et Olivier Lemaire – olivier.lemaire@inrae.fr
- UMR1131 Santé de la Vigne et Qualité du Vin / INRAE – Université de Strasbourg
- Départements scientifiques SPE et BAP
- Centre INRAE Grand Est – Colmar